La découverte du Japon à travers les expositions universelles

Les expositions universelles ont largement contribué à la diffusion de l’art japonais en Europe. À Londres

Vue de l'exposition universelle de 1867 de PAris

Vue de l’exposition universelle de 1867 de PAris

en 1962 l’Europe découvre le Japon et la culture de l’Extrême-Orient. Paris reçoit pour la première fois en 1867 une délégation japonaise officiel, l’Europe est le lieu d’exposition de nombreux objets venus du pays du Soleil Levant.

Cette omniprésence du Japon en Europe se traduit dans divers arts : en architecture avec l’épanouissement l’explosion de l’art nouveau, en peinture avec l’adaptation des estampes japonaises à une manière de peindre européenne mais aussi dans la littérature avec la découverte des haïku qui a inspiré de nombreux poètes comme Baudelaire qui parle lui de « japonaiserie ».

Cabinet de Louis Marjorelle (Walters Art Museum, Baltimore) - un exemple de mobilier art nouveau

Cabinet de Louis Marjorelle (Walters Art Museum, Baltimore) – un exemple de mobilier art nouveau

L’exploration du Japon passe aussi par le cinéma avec l’importance des frères Lumière qui échangent avec le Japon dès 1898, il y a un dialogue et une correspondance importante entre Lyon et Kyoto où sont réalisées les premières projections du nouveau médium qu’est le cinéma.

Les frères Lumière

Les frères Lumière

Il faut cependant distinguer ce qu’on pourrait appeler le japonisme c’est à dire l’inspiration du Japon et des artistes pour cet art qui le découvrent et la mode Japonaiserie. Cette mode pour les objets, pour un mode de vie devient populaire à la fin du siècle. Elle est un peu similaire à celle pour l’Egypte à la fin du siècle précédent avec les conquêtes de Napoléon et l’Egyptomania qui s’était emparée alors de la France. Cependant avec le Japon il n’y a pas de rapport de colonisés et colonisateurs ; c’un échange de savoir les artistes s’inspirent et apprennent de l’art japonais.

J.D.

Webographie :

Pascale Simon, « Chronologie : Les premières années du cinéma au Japon (1896-1920), Persée, consulté le 22 avril 2015. URL : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ebisu_1340-3656_2001_num_26_1_1102

Monet et l’estampe

Claude Monet est considéré comme un chef de file du mouvement impressionniste. Il initia le courant notamment avec sa toile Impression soleil levant et continua à le faire vivre tout au long de sa vie avec ses toiles. Le maitre recherche la lumière et la manière dont on la perçoit, la ressent. Il observe la nature, peint sur le motif, en plein air. Cependant son inspiration qui révolutionna la peinture à la fin du 19ème siècle, lui vient aussi du Levant.

Soupir, Mallarmé, 1864

Soupir, Mallarmé, 1864

Cette manière de peindre venue du Japon rompt totalement avec les conventions de la peinture occidentale. L’art de la composition des estampes marque et frappe l’œil de Monet. Il s’en inspire pour l’adapter à sa peinture et lorsqu’il organise le jardin de sa maison Monet n’oublie pas sa passion pour le Japon et l’Extrême Orient. L’élément central de son jardin est le pont japonais qui enjambe le bassin aux nymphéas qu’il peint à de multiples reprises à la fin de sa vie. Il plante aussi de nombreuses fleurs venues du Japon dont les graines sont envoyées directement par des amis du peintre du Japon. L’exposition consacrée au peintre à Giverny en 2009 reprend en partie cette problématique. L’esthétique du paysage y est étudiée, elle remarque l’influence de l’estampe dans la production des oeuvres de Monet. Le peintre travaille avec des aplats de couleur comme les grands maîtres japonais comme Hokusai ou Hiroshige dont de beaucoup des oeuvres ornent la maison et qui sont toujours visible dans le salon la salle à manger du peintre. Le musée Giverny rend honneur au Japon en invitant le peintre contemporain Hiramatsu avec une exposition de ses oeuvres inspirées par la contemplation des Nymphéas. Cette exposition témoigne que les relations, les échanges artistiques entre la France et le Japon sont toujours actives aujourd’hui. Il perdure malgré la fin du courant japoniste.

J.D.

Webographie :

Jean-Luc Toula-Breysse, « A Giverny, le Japon de Claude Monet », Le Monde en ligne, consulté le 21 avril 2015. URL : http://www.lemonde.fr/voyage/article/2009/07/01/a-giverny-le-japon-de-claude-monet_1339658_3546.html

Françoise CACHIN, « MONET CLAUDE (1840-1926)  », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 27 avril 2015. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/claude-monet/

Musée des impressionnismes, Giverny, « Hiramastu, le bassin aux Nymphéas. Hommage à Monet », consulté le 23 avril 2015. URL: http://www.mdig.fr/fr/expositions/expositions-passees/hiramatsu-le-bassin-aux-nympheas-hommage-monet

Musée des impressionnismes, Giverny, « Le jardin de Monet à Giverny, l’invention d’un paysage », consulté le 23 avril 2015. URL: http://www.mdig.fr/fr/le-jardin-de-monet-giverny-linvention-dun-paysage-0

Bonnard, « un Nabi très japonard »

 « Bien que fréquemment dénigré́, ce métissage culturel entre l’Orient et l’Occident fut pourtant à l’origine – tant en peinture qu’au théâtre et à l’opéra – d’oeuvres d’une extraordinaire beauté. »

Japonisme, Échanges culturels entre le Japon et l’Occident, Lionel Lambourne

      Pierre Bonnard est né en 1857 et est mort en 1947. Il s’inscrit dans l’histoire de la peinture comme un peintre nabi d’avant garde ayant pour héritage les travaux des impressionnistes qui ont révolutionnés l’idée même de la peinture. Bonnard peint Le peignoir en 1892, c’est, en France, le début de la IIIe république et d’une certaine stabilité politique à la fin d’un XIXe siècle tourmenté dont les artistes romantiques sont les témoins. L’attraction de l’ailleurs se fait alors de plus en plus forte dans une Europe frustrée et en pleine colonisation. A l’Orientalisme succède alors peu à peu le japonisme. Nous verrons donc comment les Nabis, par l’exemple de Bonnard, envisagent l’art de l’estampe japonaise et se l’approprie.

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Pierre Bonnard, Le Peignoir

Les nabis sont un groupe de peintres qui se retrouve pour travailler ensemble comme Vuillard, Denis ou Bonnard. Ces artistes regardent la peinture avec un œil et remettent en question la peinture occidentale et ses conventions. Ils proposent des œuvres sensuelles à la limite de l’abstraction. Ils s’inspirent aussi d‘estampes japonaises pour mieux les transcender et arriver à une peinture métissée qui serait la leur.

Dans Le Peignoir, Pierre Bonnard emprunte le format du kakemono propre aux estampes japonaises. En effet, le « Nabis très japonard » tel que le surnommait Picasso s’approprie l’ailleurs pour créer sa propre œuvre en s’y référant. La femme est représentée en pied comme les guerriers japonais ou les « beautés ».

Le tableau est aussi dépourvu de toute perspective, juste des aplats de couleurs. Les formes simples sont crées par petites touches comme l’on peut le voir pour les fleurs blanches en bas à gauche du tableau ou pour les motifs de l’habit. Les couleurs sont en parfaite harmonie : jaune, orangé, vert clair et brun. Elles sont rehaussées de noir qui structure le tableau que ce soit dans la chevelure, en bas à gauche de la toile et un trait délimitant le peignoir du fond du tableau. Ce trait noir rappelle aussi la calligraphie japonaise. On retrouve cette inspiration dans la signature du peintre.

Le visage à peine esquissé de la femme montre, que l’artiste ne cherche pas tant à la représenter qu’à montrer l’harmonie des formes et la stylisation du tableau.

J.D.

Webographie :

Gérard BERTRAND, « BONNARD PIERRE – (1867-1947) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 8 mars 2015. URL : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/pierre-bonnard/

David E. GLIEM, Japonism and Bonnard’s Invention of moderne poster[en ligne], consulté le 8 mars 2015. URL : http://www.academia.edu/2070503/Japonisme_and_Bonnards_Invention_of_the_Modern_Poster

Le regard du XXIe siècle sur le japonisme : vers une définition plus complète et complexe

   Le terme « japonisme » a résonné sur la scène artistique européenne de la fin du XIXe et du début du XXe, reprenant l’appellation employée par le collectionneur d’art français Philippe Burty vers 1870, avant que ne s’en emparent les historiens de l’art au XXe et encore à l’heure actuelle, pour tenter de définir sa nature, son champ d’application et ses origines.

   L’examen de l’historiographie permet de mettre en évidence une évolution notable quant à l’appréhension de ce terme, de laquelle dépend l’angle d’étude privilégié par les historiens de l’art. Ainsi nous nous proposons de comparer deux articles scientifiques, le premier datant de 1961, le second de 2008, afin d’illustrer cette évolution dans l’approche du japonisme, et les modifications apportées par diverses contributions depuis les années 1960.

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La diffusion des estampes à partir de collections personnelles : l’exemple de Théodore Duret

La diffusion des estampes à partir de collections personnelles : l’exemple de Théodore Duret

Les échanges commerciaux entre le Japon et la France sont de plus en plus intenses à la fin du siècle. Les navires échange des biens mais aussi une part de la culture des deux pays. Les navires embarquent marins et marchands mais aussi des intellectuels. Ils découvrent de nouveaux modes de vie et des traditions qui se traduisent aussi visuellement. Ces férus d’art japonais et plus particulièrement d’estampes veulent faire partager leur passion qui se concrétise par une collection d’oeuvres d’art. Parmi eux on peut citer Théodore Duret.

 

Édouard Manet: Portrait de Théodore Duret 1868

Édouard Manet:
Portrait de Théodore Duret
1868

Théodore Duret est un historien d’art français né en 1838. Entre 1871 et 1872, il fait un voyage en Asie. Il se passionne alors pour l’art japonais. Il collectionne les estampes des grands maîtres et aide à leur diffusion en France. Loin de considérer le Japon et ses artistes comme une terre colonisable Duret voit les rapports entre les deux pays comme un échange. Le Japon est une inspiration même si un dialogue entre les arts, les techniques se confrontent, interagissent sans perdre de leur puissance et de leur l’indépendance.

 

Né de cette rencontre une émulation favorable aux artistes comme en témoigne la volonté du peintre Kuroda de traduire et de publier en japonais l’ouvrage de Duret sur Van Gogh.

Seïki Kuroda

Seïki Kuroda (1866-1924) est un peintre japonais venu étudié la peinture en France dans l’atelier de Raphaël Collin à Paris. Il rentre au Japon en 1893 et diffuse l’art occidental et une manière de peindre à cheval entre les deux cultures. Sa toile La Toilette du matin, est présentée en 1895 à la quatrième Exposition japonaise pour le développement de l’industrie et du commerce. Il fait scandale de fait la présence d’un nu encore tabou dans les représentations officielles au Japon. Il enseigne à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Tokyo dans le département Yoga (département qui concerne le style de peinture occidentale).

Seïki Kuroda, Petite fille à Bréhat, Huile sur toile 80,6 cm x 54 cm 1891 Bridgestone Museum of Art, Ishibashi Foundation, Tokyo

Seïki Kuroda, Petite fille à Bréhat, Huile sur toile
80,6 cm x 54 cm
1891
Bridgestone Museum of Art, Ishibashi Foundation, Tokyo

 

Les échanges entre les artistes les critiques d’art sont intenses malgré la distance. Les nombreux voyages entre les deux pays sont fréquents et les voyageurs s’intéressent aux collections et aux nouveautés culturelles. Ce n’est pas un apprentissage des grands maîtres du passé mais une confrontation des artistes à leur homologues. Les collections de Duret sont vendues à la fin des années 1890. À cette occasion les oeuvres sont certainement visibles du grand public qui peut aussi admirer une collection d’estampes à la BNF (Bibliothèque Nationale de France) a qui Duret a fait un don. D’autres oeuvres d’importantes appartiennent à la collection Cernuschi avec qui Duret à voyager au Japon. Les oeuvres dont certains chef-d’oeuvre en bronze sont visibles dans hôtel particulier du collectionneur près du Parc Monceau à Paris. Aujourd’hui on peut visiter le musée qui porte son nom. Duret est aussi un collectionneur d’art français et plus particulièrement d’impressionnistes. Le collectionneur l’amateur et l’acheteur d’oeuvres d’art est alors le pont entre les deux cultures et permet la découverte et la mise en relation.

J.D.

Webographie :

Denys RIOUT, « DURET THÉODORE (1838-1927)  », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 26 avril 2015. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/theodore-duret/

Shimegi IMAGA,  » Théodore Duret et le Japon », Persée (en ligne), consulté le 24 avril 2015. URL:http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rvart_0035-1326_1988_num_79_1_347694

Le Petit Palais, « Portrait de Théodore Duret », consulté le 23 avril 2015. URL : http://www.petitpalais.paris.fr/fr/collections/27/portrait-de-theodore-duret

François BERTHIER, François CHASLIN, Nicolas FIÉVÉ, Anne GOSSOT, Chantal KOZYREFF, Hervé LE GOFF, Françoise LEVAILLANT, Daisy LION-GOLDSCHMIDT, Shiori NAKAMA, Madeleine PAUL-DAVID, Universalis, « JAPON (Arts et culture) – Les arts », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 27 avril 2015. URL : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/japon-arts-et-culture-les-arts/

Musée virtuel de Bréhat, « Peintres : Seïki Kuroda », Conculté le 27 avril 2015. URL : http://www.musee-virtuel-brehat.fr/peintres/i-z/kuroda.html